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Médecines complémentaires

De l’ail pour mes vaches ? Oui mais…

par Dr Joannick DORSO

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Connaissez-vous les vertus de l’ail ? On en trouve dans certains produits utilisés en élevage et c’est un ingrédient que nous abordons, moi et mes collègues vétérinaires, dans nos formations en médecines complémentaires. Mais peut-être que vous vous posez des questions à son sujet. A la fin de cet article, vous saurez tout sur l’ail !

Un peu d’histoire

L’ail commun ou ail cultivé (allium sativum) est une plante vivace potagère dont les bulbes sont utilisés en cuisine pour leur odeur et leur goût prononcés. L’ail serait cultivé depuis 5000 ans en Egypte et aurait été diffusé largement dans le bassin méditerranéen et jusqu’en Chine.

Il est d’abord utilisé pour ses propriétés nutritives : les ouvriers œuvrant à la construction des pyramides en auraient reçu tous les matins pour leur prêter de la force, les athlètes grecs en consommaient avant leurs épreuves des jeux olympiques, les romains avant les moissons, les gaulois avant les batailles, et même à la cour de France sous Henri IV pour donner de la vigueur au monarque. Les pères fondateurs de la médecine occidentale (Homère, Aristote, Hippocrate) lui attribuent des vertus médicinales multiples : antiseptique, bactéricide, dépuratif, diurétique, vermifuge, fébrifuge, aphrodisiaque, hypo-tenseur et même anti-cancéreux !

Les pères fondateurs de la médecine occidentale lui attribuent des vertus médicinales multiples

Composition

Mais qu’y-a-t-il dans l’ail qui aurait tant de vertus ? L’ail est riche d’une molécule inactive au départ, l’alliine, molécule qui s’active sous l’effet d’une enzyme (alliinase) lorsque l’ail est coupé, écrasé ou broyé et devient l’allicine, molécule soufrée responsable du goût et de l’odeur caractéristique de l’ail. Cet allicine se transforme ensuite en différents composés sulfurés tels que diallyl sulfide ou di-sulfide, ajoène, sur lesquels reposeraient la plupart des propriétés médicinales.
 

L’ail est également riche en anti-oxydants comme les flavonoïdes et les tocophérols. On y trouve aussi des minéraux, des vitamines et des oligo-éléments dont le Sélénium en quantité significative.

L’huile essentielle d’ail, quant à elle, est surtout riche en diallyl di-sulfide et tri-sulfide. Elle est très délicate à manipuler car les composés soufrés peuvent être dangereux à inhaler.

 

Quel intérêt pour bovins ?

Le premier usage de l’ail pour l’élevage bovin repose sur son appétence

Le premier usage de l’ail repose sur son appétence : le goût et l’odeur prononcé de la plante, loin de rebuter les bovins, va au contraire les attirer. L’ail est donc ajouté à certaines formules en alimentation animale pour rendre les aliments tout simplement plus appétents et donc favoriser leur consommation.

Le second usage met à profit les propriétés « vermifuges » de l’ail

Le second usage met à profit les propriétés « vermifuges » de l’ail. On trouve ainsi fréquemment de l’ail dans des compléments alimentaires à vocation antiparasitaire interne. Certains éleveurs distribuent même de la semoulette d’ail plusieurs jours de suite aux animaux à vermifuger. Mais attention, l’ail ne tuerait pas les vers intestinaux, il aurait un effet pour inhiber le développement des œufs de certains parasites en larves (Bastidas, 1969). Il serait donc plus prudent de l’utiliser de manière préventive, et associé à d’autres plantes ayant elles aussi des vertus antiparasitaires comme l’Armoise, la Tanaisie, la Fougère mâle, ...

Le troisième usage repose sur l’odeur des composés soufrés dégagés par l’ail ... une modification de l’odeur corporelle ... un effet répulsif sur les insectes et les acariens

Le troisième usage, à mon sens le plus pertinent, repose sur l’odeur des composés soufrés dégagés par l’ail et la dégradation de l’allicine. En effet il a été constaté une modification de l’odeur corporelle des individus consommant de l’ail, modification liée à l’élimination d’une partie des composés soufrés par la sudation. Or, ces composés soufrés ont un effet répulsif sur les insectes et les acariens. Une consommation d’ail par les bovins les expose donc moins aux agressions des insectes volant comme les mouches et peut sans doute aussi limiter l’exposition aux acariens hématophages comme les tiques.

Mais y-a-t-il des risques à utiliser de l’ail pour vos animaux ?

L’allicine et ses dérivés soufrés peuvent présenter un risque toxique en cas de surdosage, plutôt lié à un mésusage de l’huile essentielle. Mais le risque principal réside dans la modification organoleptique possible des produits animaux (lait et viande). Cela a été constaté par certains éleveurs en cas d’usage trop fréquent de la semoulette d’ail, ou de surconsommation de compléments alimentaires.

Le risque principal réside dans la modification organoleptique possible des produits animaux

 

Comment faire concrètement ?

Distribuer de la semoulette d’ail ou de l’huile essentielle d’ail est une possibilité mais cela reste compliqué à réaliser, surtout lorsque les animaux sont en pâture, et cela expose aux risques cités ci-dessus.

Aujourd’hui il existe des compléments alimentaires sous forme de pierre ou de seaux à lécher, contenant la dose d’ail requise pour obtenir l’effet répulsif recherché, et présentant une innocuité suffisante pour limiter très fortement le risque de modification organoleptique des produits animaux. Ces seaux sont très utilisés pour la gestion des mouches sur les génisses laitières ou allaitantes en pâture, mais on les voit aussi dans l’auge des bâtiments. De nombreux éleveurs les utilisent aussi sur les vaches adultes, qu’elles produisent du lait ou qu’elles élèvent leurs veaux.

Il existe des compléments alimentaires sous forme de pierre ou de seaux à lécher, contenant la dose d’ail requise pour obtenir l’effet répulsif recherché, et présentant une innocuité suffisante pour limiter très fortement le risque de modification organoleptique des produits animaux

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